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Les années de naissance (vers 590) et de décès de Saint Judicaël ne sont pas connus précisément. Ce que l’on sait avec certitude, c’est qu’il fut roi de Domnonée armoricaine (Bretagne nord) au VIIème siècle et contemporain de Dagobert, roi des Francs, et de son ministre des finances saint Éloi. Nous savons aussi qu’il mourrut à Gaël.

L’hagiographe breton Albert Le Grand nous offre une “vie de Saint Judicaël” étonnament succinte. Il ommet d’évoquer les liens ténus qu’il a entretenu avec Saint Méen. Pourtant, comme vous pouvez le voir dans les images 360° présentées dans cet article, les églises à Gaël et Paimpont honorent largement le roi saint Judicaël.

Le roi Judicaël n’a pas été canonisé par Rome mais la tradition catholique bretonne l’honore comme saint.  A l’initiative de l’archevêque de Rennes, le cardinal Charost,  a été organisée, en 1925, une fête pour la canonisation de saint Judicaël.

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La vie de Saint Judicaël

Selon l'hagiographe Albert Le Grand dans "La vie des saints de la Bretagne-Armorique". Traduit en français contemporain par Arnaud Chapin

Saint Judicaël, premier-né de Juhaël, souverain des terres baignées de la mer Domnonéenne en Bretagne, et de Pritelle, noble fille d’Ausoche, seigneur du Comté de Léon, fut élevé, aux côtés de ses frères Josse et Winoc, dans l’enceinte majestueuse du palais de son père. À la mort de ce dernier, il fut couronné solennellement, portant sur ses épaules le poids du sceptre et la responsabilité de son peuple, lequel, dans sa candeur, espérait un âge d’or sous la gouvernance d’un prince aussi vertueux et pieux.

Ainsi investi du pouvoir, Judicaël gouverna avec sagesse et paix durant de précieuses années, jusqu’à ce que l’ombre de Dagobert, monarque des Francs, ne vienne obscurcir l’horizon de sa quiétude. Les raisons de cette discorde ont été longuement contées par nos chroniqueurs. Les deux rois, poussés par l’orgueil et l’appétit de territoire, firent résonner le fracas des armes.

Les premières incursions vinrent de France, les soldats fouillant les terres bretonnes en quête de pillage. Mais les fils de la Bretagne, impétueux et farouches, fondirent sur eux, les contraignant à battre en retraite et abandonner leur butin. Puis, tel un torrent dévastateur, ils s’engouffrèrent dans le Maine, semant le chaos jusqu’aux portes du Mans.

Dagobert, loin de s’avouer vaincu, rassembla ses forces et dépêcha son armée sous la bannière de Guy, comte de Chartres. Celui-ci rencontra les Bretons entre le Mans et Laval. Ces derniers, rusés comme des renards, avaient dressé une embuscade dans un défilé sombre, attirant ainsi les Français dans un piège mortel.

Trois mille braves, menés par Budic, comte de Cornouaille, jaillirent soudain de l’ombre, frappant les envahisseurs de plein fouet. Dans la confusion et le tumulte, le général Guy fut fait captif par le seigneur du Pont-Labbé et conduit devant le roi, une pièce maîtresse tombée entre les mains du vaillant Judicaël.

Dans le Choeur de Notre-Dame de Paimpont, les vitraux présentent la vie de Saint Judicaël.
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Le roi saint Judicaël est clément et pacifique.

Le roi Judicaël, ayant défendu son cher pays et épuisé les forces de son ennemi, au lieu de s’enorgueillir de sa victoire et d’exploiter cet avantage avec avidité, ordonna le repli de ses troupes. Il les positionna stratégiquement dans les places frontalières, leur enjoignant expressément de ne commettre aucun acte hostile tant que l’on ne les attaquait pas. Cette décision étonna le roi Dagobert, qui comprit, à travers cette action, que ce prince, qu’il avait jadis attaqué avec une légèreté insouciante, était bien différent de ce qu’il avait imaginé : un souverain plus enclin à la paix avec ses voisins qu’à la conquête de leurs terres.

Cette attitude suscita en lui le désir ardent d’obtenir son alliance et son amitié. Dans cette intention, il dépêcha une ambassade distinguée, dirigée par saint Eloi, évêque de Noyon, en tant que chef éminent. Ce saint envoyé fut reçu par le roi avec les honneurs les plus solennels, ordonnant que dans toutes les cités de son royaume, on l’accueille comme on le ferait pour sa propre personne.

Il accorda à saint Eloi une audience privée au sein de son conseil, échangeant des propos confidentiels. Le saint homme, avec son éloquence sacrée, gagna une telle influence auprès de Sa Majesté qu’il le persuada de se rendre à la rencontre du roi Dagobert à Clichy la Garane, près de Paris. Là, il aurait l’opportunité de communier avec plusieurs saintes personnalités qui évoluaient à la cour du monarque des Francs.

Le roi Dagobert Ier

Dagobert Ier, né vers 602/605 et mort le 19 janvier 638 ou 639, fut un roi des Francs de la dynastie mérovingienne. Fils de Clotaire II (584-629), arrière-arrière-petit-fils de Clovis, il règna sur le royaume des Francs de 629 à 639.

Saint Éloi (588 † 660) fut évêque de Noyon. Orfèvre et monnayeur Franc, il eut une fonction de ministre des finances auprès de Dagobert Iᵉʳ. Reconnu saint par l’Église catholique, il est fêté le 1ᵉʳ décembre. 

Saint Éloi

Saint Judicaël fait la paix avec Dagobert.

Après que le voyage en France fut diplomatiquement convenu, le roi ordonna son départ en compagnie des princes Josse, Winoc et Hoël, ses frères. Ils prirent la route et rencontrèrent le roi Dagobert à Clichy, où il fut accueilli avec chaleur. Dès le lendemain, ils entamèrent des pourparlers pour résoudre leurs différends. Ils parvinrent à conclure une paix juste et durable entre leurs royaumes et leurs sujets.

Au moment du départ, saint Judicaël fit à Dagobert de généreux présents, et celui-ci lui rendit hommage avec d’autres présents, en signe de leur engagement envers cette paix inviolable.

Pendant son séjour à la cour de Dagobert, saint Judicaël refusa de loger dans le palais qui lui avait été préparé, préférant résider chez Saint Ouen, le maître du palais et chancelier de France, qui, par sa piété et sa sagesse, transformait sa demeure en un véritable havre de paix, évoquant davantage un monastère qu’une demeure de courtisan. Là, il échangea avec de nombreux religieux, nourrissant son âme de leur sainte conversation et de leur amour pour Dieu.

Tellement touché par cette expérience, saint Judicaël, de retour en Bretagne, prit la décision de renoncer au gouvernement de son royaume au profit de son frère aîné, le prince Josse, et de se retirer dans un monastère en tant que moine. Il fit part de sa décision au prince, qui, en réponse, quitta la cour et se retira comme ermite, suivant ainsi les pas de son frère saint Winoc, comme nous l’avons raconté dans sa vie.

Dans la nef de l'église de Gaël, la fresque présente Saint Judicaël.
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Saint Judicaël abdique pour devenir moine.

Malgré son désir profond de se consacrer entièrement au service de Dieu dans la vie religieuse, le roi, préoccupé du bien de son royaume, convoqua les États et, en leur présence solennelle, renonça à la dignité royale. Par la suite, il se rendit à l’abbaye de Saint-Jean-Baptiste de Gaël, où, humblement, il se prosterna aux pieds de l’abbé (Il s’agit de Saint Méen. NDT), implorant d’être admis parmi ses frères religieux.

La nouvelle de cette décision inédite se répandit rapidement dans toute la Bretagne, attirant une foule avide de voir ce prince échanger sa pourpre royale contre l’habit humble d’un moine. Revêtu de ses vêtements royaux, accompagné de ses fidèles serviteurs, il se présenta devant l’autel sacré. Sous les regards émus de l’assemblée, il fut dévêtu de ses ornements royaux, faisant couler les larmes des témoins émus par cette scène poignante.

Il entreprit ensuite la reconstruction complète de l’abbaye, lui attribuant des revenus généreux. Dans ce lieu de piété, il vécut dans une sainteté exemplaire jusqu’à sa mort, trouvant enfin repos éternel dans sa tombe sacrée. Dieu manifesta sa sainteté à travers de nombreux miracles qui se produisirent à son sépulcre.

Pour protéger ses reliques de la furie des Normands qui ravagèrent la Bretagne en l’an 878, son corps fut transféré à Saint-Jouin-de-Marnes en Poitou. Là, il reposa en compagnie d’autres saints, dont Saint Jouin, patron du lieu, Martin de Vertou, Lumine, Rufin et Marculphe. Cette translation fut réitérée une seconde fois en l’an 1130.

Chaque année, une solennelle fête des Reliques est célébrée en son honneur, le dimanche suivant la Nativité de Notre-Dame en septembre, témoignant de la vénération perpétuelle dont il est l’objet.

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